
Les futurs médecins "n’ont pas à être pénalisés" : les syndicats de jeunes présentent 10 mesures pour améliorer le système de santé
En pleine mobilisation contre la proposition de loi Garot, l'association des étudiants en médecine, les syndicats d'internes, de jeunes médecins et de remplaçants ont présenté lundi 28 avril leur "plan d’actions global pour renforcer la médicalisation dans les territoires". Une façon de rappeler que les premiers concernés ont aussi leur mot à dire.

"L’accès aux soins s’est nettement dégradé mais est-ce que c’est la faute des étudiants, des internes et des jeunes médecins généralistes ? Ils considèrent qu’ils n’ont pas à être pénalisés", avertit d’entrée de jeu l'économiste Frédéric Bizard, président de l’Institut Santé. Lundi 28 avril, l’Anemf, l’Isni, l’Isnar-IMG, ReAGJIR et l’Institut Santé ont présenté un plan d’actions permettant de limiter la désertification médicale. L’alliance de ces organisations, aussi appelée "Conf’ Santé des Jeunes médecins", intervient en plein contexte de grève et de mobilisation contre la proposition de loi Garot visant notamment à réguler l’installation des médecins généralistes.
Dans ce plan, pas question de coercition mais plutôt une "recherche de consensus" entre les acteurs de terrain. "Chaque organisation a tenté de trouver des solutions puis nous avons mis en commun toutes nos réflexions", précise Frédéric Bizard, en guise d’introduction. "Nous voulions partir des territoires, comment les médicaliser et nous avons retenu les propositions les plus consensuelles", explique le Dr Raphaël Dachicourt, président de ReAGJIR.
Au total, ce sont donc dix mesures qui sont présentées et qui doivent être considérées dans leur ensemble. "Il n’y a pas de baguette magique, c’est l’ensemble du contenu qu’il faut apprécier", argue le président d’Institut Santé.
Attirer les jeunes médecins dans les zones sous-denses
Parmi ces mesures, certaines sont déjà défendues depuis des années par les représentants des futurs médecins. Côté formation, la Conf’ Santé des Jeunes médecins mise sur "l’augmentation des stages dans les zones sous-denses pour explorer la médecine en-dehors du CHU", précise Lucas Poittevin, président de l’Anemf. Une façon "de mieux répartir" les étudiants en médecine, toujours plus nombreux (+18 % entre 2020 et 2024) et de "préserver la qualité de la formation". Pour y parvenir, l’Anemf compte sur une indemnité de transport et un accès à des hébergements.
Comme l’indique Bastien Bailleul, président de l’Isnar-IMG, la réforme de l’internat de médecine générale doit elle aussi permettre aux futurs professionnels de santé de s’implanter dans les zones sous-denses. "Les généralistes manquent d’informations sur les démarches pour entrer dans le libéral donc la quatrième année d’internat doit faciliter l’installation. Mais les décrets d’application ne sont toujours pas publiés." Et pour que ces stages soient incitatifs, le président du syndicat rappelle la nécessité d’améliorer l’attractivité du statut des MSU, encore trop peu nombreux pour encadrer tous les docteurs juniors en médecine générale : "Il nous faut un accompagnement avec des cabinets disponibles, des médecins à proximité, une qualité de vie personnelle et des aides financières", résume Bastien Bailleul.
La création d’un statut "d’assistant en ambulatoire"
La solution pourrait venir de la création d’un nouveau statut, celui d’assistant en ambulatoire pour les médecins spécialistes. Le statut était à présent ouvert uniquement aux médecins généralistes. Le nombre d’AUMG (assistant universitaire de médecine générale) devra quant à lui être doublé, en contrepartie d’installation dans les zones sous-denses. De quoi à la fois opérer le "virage ambulatoire", renforcer "le lien ville-hôpital" et ainsi gagner en attractivité sur les territoires.
En parallèle, ReAGJIR insiste aussi sur le développement du statut de médecin assistant : "C’est un statut similaire à celui de remplaçant sauf que le médecin exerce en parallèle pour répondre aux besoins de santé. Ce statut a du potentiel pour permettre de s’ancrer progressivement, notamment dans les zones sous-dotées", confirme Raphaël Dachicourt. L’inclusion de ce mode d’exercice dans le cadre conventionnel pourrait davantage inciter les jeunes médecins à s’emparer de ce statut, pour l’instant peu reconnu.
Et là encore, la question des aides sera déterminante. "On pense tout de suite aux aides financières or, l’aspect financier est assez peu présent chez les médecins, ce n’est pas le premier déterminant à l’installation." Le président de ReAGJIR mise sur une meilleure coordination de ces aides, "qu’elles aient du sens, qu’elles répondent à un besoin et pas à une surenchère". La création d’un guichet unique pour permettre un accompagnement personnalisé des nouveaux médecins généralistes fait d’ailleurs partie des pistes régulièrement reprises par le syndicat.
"On ne pourra pas dire que les jeunes ne proposent rien"
Parmi les autres mesures évoquées, celles d’impliquer davantage les "médecins proches de la retraite". A l’heure où déjà plus de 20.000 médecins retraités poursuivent leur activité (+6,5 % d’actifs retraités entre 2024 et 2025), les organisations misent sur une accompagnement plus complet et individualisé pour inciter les médecins de plus de 60 ans à travailler plus longtemps. L’"universitarisation de la médecine de ville" avec l’ouverture de postes universitaires pour les médecins généralistes exerçant en ville et dans les zones sous-denses pourrait être un levier.
Mais ce plan ne pourrait être mis en œuvre sans l’implication de tous les acteurs, professionnels de santé ou non (CPAM, Association des maires de France…). "Il y a des zones marquées d’un fer rouge ou d’un fer blanc et il est difficile d’y recréer de l’attractivité, il faut donc réunir les acteurs locaux pour trouver des solutions pratiques afin que le jeune externe ou interne se sente bien sur le territoire", résume Frédéric Bizard. Pour y parvenir, "l’État doit déléguer ce plan", non pas aux ARS mais aux unions régionales des professionnels de santé (URPS), qui restent "sous-utilisées". "Il faudrait une mission dédiée, avec une contractualisation entre URPS et ARS afin qu’elles puissent mettre en place ce plan."
En attendant, les représentants des étudiants en médecine, internes et jeunes médecins restent mobilisés ce mardi 29 avril pour protester contre les différentes propositions de loi déposées (Garot, Mouiller) et le plan proposé par le Premier Ministre, François Bayrou, qui appelle notamment à une "solidarité obligatoire" des médecins vis-à-vis des zones sous-denses. "On ne réinvente pas la roue avec ce plan, les solutions sont sur la table, charge à nous de les préciser au Gouvernement pour qu’il s’en empare, avance Raphaël Dachicourt. Ces propositions sont structurées et font consensus auprès de toutes les organisations de la jeunesse, c’est assez inédit. On ne pourra pas dire que les jeunes ne proposent rien."
Les 10 mesures du plan des étudiants en médecine et jeunes médecins
1. Augmenter significativement le nombre de stages dans les zones sous-denses
2. Inciter les docteurs juniors à s’implanter dans les zones sous-denses
3. Accélérer l’implantation des assistants en ambulatoire et développer les postes universitaires dans les zones sous-denses
4. Favoriser l’installation dans les territoires le plus tôt possible par la flexibilité et la diversité des statuts
5. Inciter les médecins proches de la retraite à poursuivre leur activité plus longtemps
6. Renforcer l’universitarisation de la médecine de ville aussi par les médecins de plus de 60 ans pour accroître la médicalisation des territoires
7. Amplifier les initiatives solidaires en cours pour améliorer l’accès aux soins dans les zones les plus critiques
8. Donner du sens aux aides à l’installation
9. Mettre en place une démocratie participative dédiée à médicaliser les zones sous-denses
10. Missionner les URPS médecins pour piloter le plan d’action de la médicalisation des territoires
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