médecin

Justice ordinale, pénale ou civile : pendant combien de temps la responsabilité d'un médecin est-elle engagée ?

Le délai de prescription, en matière de responsabilité médicale, est variable selon la juridiction saisie (civile, pénale, ordinale). Explications….

27/04/2025 Par Nicolas Loubry
médecin

Exerçant à titre libéral, votre responsabilité peut être recherchée sur le plan civil, pénal et disciplinaire.

En choisissant la voie civile, un patient mécontent va chercher à obtenir une indemnisation, c'est-à-dire la réparation d’un préjudice en lien avec une faute médicale occasionnée par son médecin. En première instance, ce seront les tribunaux judiciaires qui seront compétents (anciennement tribunaux d’instance et de grande instance). La procédure peut varier selon la nature et la complexité de l’affaire : elle peut être immédiate ou engagée plusieurs mois, voire plusieurs années après les faits. En se rappelant que le principe posé à l’article L.1142-1 du Code de la santé publique est une responsabilité pour faute : le patient insatisfait doit ainsi prouver que son médecin a commis une faute en lien avec son dommage. Pour mettre en cause un médecin devant une juridiction civile, un patient dispose d’un certain délai, appelé délai de prescription. La prescription d’une action en justice est le délai au-delà duquel cette action n’est plus recevable du fait du temps écoulé. Ce délai est fixé à 10 ans, à compter de la consolidation du dommage, par l’article L.1142-28 du Code de la santé publique. Cette consolidation correspond à la date à laquelle l’état de la victime est considéré comme stabilisé. La date de consolidation peut donc être tardive et ainsi faire reculer le point de départ de ce délai de prescription au-delà duquel toute action en responsabilité et en indemnisation est, en principe, interdite. Par ailleurs, le délai de prescription peut être interrompu ou suspendu par certains évènements (mesure d’instruction, recherche de médiation…). Lorsque le patient est un enfant mineur notamment, ce délai de prescription est suspendu jusqu’à sa majorité : la responsabilité du médecin pourra alors être recherchée pendant 28 ans, voire plus si la consolidation est fixée bien après la majorité du patient !

En choisissant la voie pénale, un patient mécontent va chercher à sanctionner un médecin pour un comportement indigne de sa profession (peines d’amende, prison avec ou sans sursis, interdiction d’exercice à titre temporaire ou définitif). Les infractions les plus fréquemment invoquées en cas de contentieux médical correspondent à des délits et relèvent des tribunaux correctionnels. Ces poursuites concernent, le plus souvent, des homicides involontaires, des atteintes involontaires à l’intégrité physique, une non-assistance à personne en danger ou encore une violation du secret médical. S’agissant de délits, le délai de prescription est fixé à 6 ans.

En choisissant la voie ordinale, et donc disciplinaire, un patient insatisfait va chercher à sanctionner un médecin qui aurait contrevenu aux règles déontologiques de sa profession. Cette procédure engagée devant le Conseil de l’Ordre peut être sanctionnée par un avertissement, un blâme, une suspension temporaire du droit d’exercer (avec ou sans sursis), une interdiction temporaire ou permanente (avec ou sans sursis) d’exercer des fonctions conférées ou rétribuées par l’Etat, les départements, les communes, les établissements publics, et une radiation du tableau de l’Ordre. Contrairement aux procédures civiles et pénales, il n’existe pas de délais pour saisir l’Ordre. Les griefs sont imprescriptibles et peuvent donc donner lieu à des poursuites disciplinaires, sans condition de délai.

Ces différents délais de procédure nécessitent, pour les médecins, de conserver leurs dossiers médicaux le plus longtemps possible, afin de pouvoir s’expliquer et se justifier, en cas de mise en cause tardive.     

 
Vignette
Vignette

La sélection de la rédaction

Podcast Histoire
Médecin militaire, pilote d’hélicoptère, parachutiste… La vie "extraordinaire" du général Valérie André
04/04/2025
0
Déserts médicaux
"Médecin généraliste, j'ai ouvert un cabinet secondaire dans un désert… et ça n'a pas duré"
06/05/2025
14
Histoire
Autopsie d'Hitler : la contre-enquête d'un médecin légiste français
30/04/2025
2
PASS/LAS
Externes, internes : les étudiants en médecine rapportent des centaines de milliers d'euros à l’État
20/01/2022
1
La Revue du Praticien
Diabétologie
HbA1c : attention aux pièges !
06/12/2024
2
Vidéo Démographie médicale
Egora décrypte la proposition de loi Garot
11/04/2025
0