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Asthme et sport chez l'enfant : gérer la bronchoconstriction induite par l'exercice

Dans un contexte sportif, l'asthme se manifeste souvent par une bronchoconstriction induite par l'exercice (BIE). Souvent mal prise en charge, la BIE peut mener à réduire inutilement l’activité physique des enfants.

08/05/2025 Par Alexandra Verbecq
20e Congrès francophone d'allergologie
asthme enfant

Très fréquent, l’asthme induit par l'exercice (AIE) concerne de 50 à 90% des enfants asthmatiques. La bronchoconstriction induite par l'exercice (BIE) est une obstruction transitoire des voies aériennes inférieures. Elle intervient dans la phase de récupération après un effort avec hyperventilation (d’une durée d’environ 10 min). « L’exercice, facteur déclenchant, doit être intégré comme élément de contrôle ou de non-contrôle de l’asthme. La BIE est beaucoup plus fréquente chez les sportifs de haut niveau, notamment dans les sports d’endurance », précise le Dr Bertrand Delaisi, pédiatre, Institut de l’enfant (Boulogne Billancourt)

Deux mécanismes physiologiques principaux sont impliqués. L’un est thermique : une perte de chaleur entraîne une augmentation du tonus musculaire, des sécrétions de mucus, un réchauffement des voies aériennes, un œdème bronchique. L’autre est osmotique : une déshydratation crée un environnement hyperosmolaire, une rétraction cellulaire et le relargage de médiateurs stimulant certaines fibres neurologiques, notamment de type C.

Le diagnostic différentiel dans la BIE évite les erreurs thérapeutiques. En effet, la BIE peut être confondue avec d’autres pathologies respiratoires ou cardiaques comme le syndrome d’hyperventilation (caractérisé par une dypsnée d’effort) ou la dyskinésie épisodique laryngée (déterminée par une adduction paradoxale des cordes vocales pendant l’inspiration).

Le traitement pharmacologique classique de l’AIE inclut les bêta-2 agonistes de courte durée d’action (Saba), les corticostéroïdes inhalés (CSI) et les anti-leucotriènes (ALT). « Les Saba, pris 5 à 20 min avant l’exercice, préviennent ou atténuent la BIE pendant 2 à 4h chez 80% des patients. Un maximum de trois boîtes/an est conseillé car un usage quotidien crée un risque d’accoutumance. Les CSI forment le traitement de fond. Leur effet protecteur est dose-dépendant et s’installe en quatre semaines. Enfin, pris 2h avant l’exercice, les ALT réduisent les BIE. Ces derniers présentent toutefois des problèmes de tolérance, notamment psychiatrique et des réponses très variables d'un patient à l'autre », précise-t-il.

 

Traitements non pharmacologiques : échauffement et préparation

La stratégie des traitements non pharmacologiques est d'induire une période réfractaire c’est à dire une réduction de la réactivité bronchique pendant 1 à 2h après un premier effort. « Parfois, les traitements pharmacologiques ne fonctionnent pas seuls, il est alors important de considérer ceux non-pharmacologiques car ils induisent une diminution de 10% de la chute du VEMS vs l'absence d’échauffement. Cette stratégie de protection se cumule », mentionne le pédiatre. Les modalités de l’échauffement consistent à pratiquer 10 à 15 min d’exercices de haute intensité (70 à 85% de la fréquence cardiaque maximale) de façon intermittente (par ex. 30 sec de courses rapides suivies de 30 sec de marche, à répéter plusieurs fois). « Chez les enfants qui ne sont pas entraînés, l’échauffement peut être associé à des exercices d'intensité modérée afin d’éviter une situation de dyspnée trop importante », conseille-t-il.

 

Recommandations Gina 2024 : une approche globale

Les recommandations 2024 de la Global initiative for asthma (Gina) soulignent la nécessité d’une approche globale de l’AIE. Le contrôle de l’asthme doit être évalué régulièrement et les traitements de fond (CSI et ALT) ajustés. L’utilisation préventive des Saba est conseillée pour les enfants présentant des symptômes récurrents de BIE mais doit rester limitée aux situations d’efforts physiques afin d’en éviter l’accoutumance. Enfin, l’échauffement doit être progressif et intermittent notamment dans les sports d’endurance.

« L’objectif est que les enfants aient une vie normale et fassent le sport qu'ils aiment. Éviter la spirale du déconditionnement et les problèmes de surpoids est très important », conclut le Dr Delaisi.

 

Objets connectés dans l’asthme de l’enfant : vraiment utiles ?

Spiromètres, inhalateurs et stéthoscopes connectés, capteurs de qualité d’air, robots compagnons,… les objets connectés, dont l’objectif est de limiter les crises et d’optimiser le contrôle de l’asthme de l’enfant, ont une efficacité variable. « Développés pour la télésurveillance afin de détecter précocement les signes de détérioration, les spiromètres n’ont pas montré de bénéfice sur les symptômes, les crises d’asthme, le recours aux soins et la qualité de vie vs une prise en charge habituelle », indique le Dr David Drummond, pédiatre, hôpital Necker-Enfants Malades. Du côté des inhalateurs connectés, ils renseignent sur l’observance du traitement de fond et le recours aux bronchodilatateurs de courte durée d’action. Certains intègrent des capteurs de débit permettant de vérifier la technique d’inhalation. Pour le spécialiste : « Ce type de télésurveillance a amélioré significativement le contrôle de l’asthme des enfants suivis sur 1 anAssociés à une alarme, ils améliorent l’observance. Et avec une géolocalisation, ils renseignent sur les zones polluées. Ces dispositifs pourraient devenir un outil indispensable dans les prochaines années ». Les stéthoscopes connectés sont des dispositifs appliqués sur le thorax des enfants et reliés en bluetooth au portable des parents. « Ils analysent les sons respiratoires grâce à une IA dont la sensibilité est meilleure que celle des médecins et la spécificité équivalente. Ils sont très utiles pour détecter des sibilants chez les enfants d’âge pré-scolaire », précise le médecin. Du côté des robots compagnons, ils accompagnent les enfants dans la prise de leur traitement de fond avec pour objectif de renforcer l’observance et d'améliorer les techniques d’inhalation. Un essai randomisé contrôlé est actuellement en cours afin de juger de leur efficacité. Enfin, les capteurs de qualité de l’air sont capables de mesurer les paramètres météo et les niveaux de certains polluants. « Ils représentent potentiellement une révolution dans la prise en charge de l’asthme. Leur limite actuelle est qu’ils ne sont pas conçus pour un usage médical et ne répondent donc pas aux mêmes exigences », regrette le Dr Drummond.

 

Références :

20e Congrès francophone d’allergologie, Paris palais de Congrès, 15-18 avril 2025. D’après la session "L’asthme de l’enfant au quotidien".

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