Contraception estroprogestative : valerate d’estradiol ou ethinylestradiol ?

05/07/2022 Par Pr Philippe Chanson
Endocrinologie-Métabolisme Gynécologie-Obstétrique
Les traitements oraux contraceptifs inhibent l’ovulation en agissant sur l’axe hypothalamo-hypophyso-ovarien, principalement en inhibant la sécrétion des gonadotrophines hypophysaires. Ceci conduit à un arrêt du développement folliculaire et de l’activité ovarienne avec une diminution des concentrations circulantes d’estradiol et de ses métabolites. De plus, la contraception orale augmente la synthèse des protéines estrogéno-sensibles comme la SHBG, la protéine de liaison de l’estradiol et de la testostérone.

  On sait que la contraception orale est associée à un petit risque d’accident veineux thrombo-embolique et de thrombose artérielle ainsi qu’à des changements métaboliques. Si la réduction des doses, initialement élevées, d’éthinyl-estradiol a permis d’améliorer leur sécurité, on dispose maintenant aussi d’estrogènes naturels remplaçant l’éthinyl-estradiol, comme le valérate d’estradiol, associés à un progestatif dans la pilule. Ces estrogènes naturels ont moins d’effets métaboliques et des effets probablement différents sur l’hypophyse. Comment se comparent, à ce titre, ces deux types d’estrogènes utilisés en contraception orale ? Pour répondre à cette question, une étude finlandaise a été menée, comparant le valérate d’estradiol associé au dienogest (un progestatif), à l’éthinyl-estradiol associé au dienogest. Le témoin était du dienogest seul. L’étude faisait partie d’une étude randomisée qui a inclus 59 femmes de 18 à 35 ans, ayant une ovulation, recrutées en Finlande, et qui ont eu de manière randomisée soit du valérate d’estradiol + du dinogest (VE-DNG), soit de l’ethinyl-estradiol 0.03 mg + du DNG 2 mg (EE-DNG), soit du DNG 2 mg pendant 9 semaines. Le VE-DNG inhibe la FSH de -27 % en médiane (IC 95 % = -51 % à -3 %) alors que l’EE-DNG l’inhibe de 64 % (-78 à -51 ; p = 0.04). Cependant, l’AMH diminue dans les 2 groupes de manière similaire de 9 % (-18 à -0.1 %) vs -13 % (-28 à +0.2 ; p = 0.38). Le VE-DNG augmente la SHBG de 56 % (30 à 82 %) alors que l’EE-DNG l’augmente de 385 % (313 à 423 % ; p < 0.001). La testostérone totale diminue de 16 % sous VE-DNG (-27 à -5 %) alors qu’elle ne diminue pas dans le groupe EE-DNG. L’index d’androgène libre diminue de 39 % (-54 % à -25 %) dans le groupe VE-DNG vs -72 % (-78 à -67 ; p < 0.001) dans le groupe EE-DNG. Le DNG seul ne modifie pas ces paramètres. En conclusion, en comparaison avec l’éthinylestradiol associé au DNG, le traitement par le valérate d’estradiol + le DNG entraîne une inhibition moindre de l’hypophyse et réduit l’induction de la synthèse de SHBG ce qui, potentiellement, pourrait témoigner d’effets plus bénéfiques sur la santé.

 
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