Médecin expert : les règles d'impartialité rappelées par le Conseil d'Etat

08/01/2024
Selon l’article R.4127-105 du Code de la santé publique, un médecin ne doit pas accepter une mission d’expertise dans laquelle sont en jeu ses propres intérêts, ceux d’un de ses patients, d’un de ses proches, d’un de ses amis ou d’un groupement qui fait habituellement appel à ses services.

  Un médecin peut avoir un cabinet où il reçoit sa patientèle et pratiquer, de façon concomitante, une activité de médecin expert pour des compagnies d’assurances, des tribunaux… En sa qualité de médecin inscrit au tableau de l’Ordre, un médecin expert amiable ou judiciaire est tenu de respecter le Code de déontologie médicale. Il doit ainsi se récuser s’il considère que les questions qui lui sont posées sont étrangères à sa spécialité, à ses connaissances, à son domaine de compétences. En effet, un médecin, notamment expert judiciaire, doit remplir certaines conditions d’intégrité et de probité et justifier d’une expérience professionnelle dans les domaines pour lesquels il est sollicité. Il se doit de respecter scrupuleusement le secret médical, informer la personne qu’il doit examiner de sa mission et ne jamais être à la fois médecin-expert et médecin traitant d’un même malade. Son impartialité ne doit pas être mise en doute, comme l’a rappelé un récent arrêt du Conseil d’Etat, du 11 octobre 2023.   Refus de la mission Dans sa décision, la juridiction administrative a jugé que l’impartialité d’un médecin expert pouvait être remise en cause lorsque celui-ci entretient des relations professionnelles avec l’assureur de la personne dont la responsabilité est recherchée. Et d’en conclure que ce médecin aurait dû refuser cette mission d’expertise. Il s’agissait, en l’espèce, d’un dossier de responsabilité hospitalière alors que le médecin désigné comme expert par la juridiction administrative avait assuré lors de l’année de sa désignation, en qualité de médecin-conseil, plusieurs missions, dont certaines étaient encore en cours, pour le compte de l’assureur du centre hospitalier régional et universitaire dont la responsabilité était aujourd’hui recherchée par l’assureur ayant indemnisé la victime d’un grave accident de la circulation. Pour justifier ce refus d’accepter cette mission d’expertise judiciaire, compte tenu des liens professionnels qui l’unissaient à cet assureur, partie prenante au procès, le Conseil d’Etat était tenu de rechercher si, eu égard à leur nature, à leur intensité, à leur date et à leur durée, les relations directes ou indirectes entre cet expert et l’une ou plusieurs des parties au litige étaient de nature à susciter un doute sur son impartialité.  Pour le Conseil d’Etat, « doivent en principe être regardées comme suscitant un tel doute les relations professionnelles s’étant nouées ou poursuivies durant la période de l’expertise… ». Selon l’article 237 du Code procédure civile, un médecin expert doit accomplir sa mission avec « conscience, objectivité et impartialité ». Au cours de l’expertise, ce praticien doit rester neutre, faire preuve de moralité et de probité, dans le respect d’une éthique rigoureuse, nécessaire au bon fonctionnement d’une justice qui se doit d’être irréprochable.  

Nicolas Loubry, juriste
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