Déménagement

"Les internats sont souvent vétustes" : jeune médecin, il crée une plateforme pour aider les internes à se loger

Externat, internat, lieux de stage, inter-CHU… Les carabins sont régulièrement amenés à déménager lors de leurs études. Face à la crise du logement, le Dr Olivier Dosseh, cardiologue, a lancé HomeDoc pour "faciliter l’accès au logement des internes".

01/05/2025 Par Mathilde Gendron
Internat Santé numérique
Déménagement

En août dernier, le Dr Olivier Dosseh, cardiologue, termine tout juste son internat, lorsqu’il décide de créer un site pour "faciliter l’accès au logement des internes". Lui-même a été confronté plusieurs fois à cette problématique. "J’ai fait mon externat à Paris, puis j’ai déménagé à Rouen pour faire cardiologie. J’ai dû faire plusieurs aller-retours pour faire des visites" de logements, indique-t-il. Malgré tout, il s’estime chanceux, car "c’était il y a cinq ou six ans, donc c’était un peu plus facile de trouver un logement que maintenant, et c’était Paris-Rouen".

Il effectue ses stages à Dieppe, au CHU de Rouen et à Elbeuf. "Je n’ai pas été au Havre parce que c’était trop loin de Rouen et que ça impliquait de déménager", explique le cardiologue. Selon lui, l’avantage de Rouen, c’est que la plupart des villes en périphérie sont à proximité, à l’inverse de Tours (Indre-et-Loire) par exemple, une ville qu’il a refusée pour cette raison.

De nombreux internes sont obligés de déménager selon leurs lieux de stage. Les logements à l’internat* peuvent être une solution, mais lui l’avait exclue. "On est dans la tranche 25-30 ans, on n’a pas forcément envie d’être en collectivité pendant six mois. Et les internats sont souvent vétustes", confie-t-il. D’autant que le nombre de places sur toute la France est insuffisant. "Il ne couvre pas plus de 50% du nombre d’internes chaque année."

Après ses stages, le cardiologue avait un rêve : effectuer un inter-CHU. "30 à 40% des internes en font pour se former sur des compétences auxquelles ils n’ont pas accès dans leur CHU initial et voir le fonctionnement d’autres centres." Il ne parviendra cependant pas à en faire un. Propriétaire de son logement à Rouen, "il [lui] fallait concilier la gestion de [son] logement actuel et en trouver un autre dans la ville de l’inter-CHU pour six mois", confie-t-il avec regret, en ajoutant qu’il était à ce moment en stage aux soins intensifs. "Je n’avais pas la disponibilité pour faire les allers-retours et visiter des appartements…"

 

Des recherches via des groupes Facebook

Pour s’aider dans leur recherche, les internes utilisent pour la plupart les groupes Facebook. "Il y en a un peu plus de 39 en France. Ils se recommandent les appartements qu’ils ont trouvés, annoncent s’ils partent… Quand ils sont propriétaires, ils mettent leur appartement à disposition le temps de faire l’inter-CHU et de revenir après."

À la manière du Bon Coin, ils postent des annonces. "C’est que ce n’est pas bien encadré. Les profils ne sont pas vérifiés, on ne sait pas si c’est vraiment un interne [derrière le compte, NDLR]. On n’a pas forcément la possibilité de visiter l’appartement [si on n’est pas à proximité]. Pour les sous-locations, je ne suis pas sûr que l’accord du propriétaire soit toujours demandé, par faute d’information." D’autant qu’avec le nombre de demandes, il faut être réactif. "C’est sur le fil d’actualité Facebook, donc dès qu’on repère une annonce, elle part très vite."

Le Dr Dosseh lance alors HomeDoc, une plateforme qui met en relation des propriétaires - internes ou non - avec d'autres internes en recherche de logement. Les profils sont vérifiés un à un par le Dr Dosseh. Les numéros RPPS ainsi qu’une pièce justificative sont demandés pour vérifier l’identité. "L’interne fait ensuite ses vœux sur le semestre d’été ou d’hiver. Il note la ville de recherche et le type de bail [mobilité** ou standard]." L’interne est ensuite mis en relation avec des propriétaires ayant un logement qui coïncide avec ses critères.

Théo Fallot, interne en anesthésie-réanimation, au CHU de Rouen a tout de suite été intéressé. "Je suis à Rouen depuis six mois et je cherchais un logement. Jusqu’ici, je logeais chez une autre interne, partie faire un inter-CHU." Il est tombé sur un post Facebook d’Olivier Dosseh expliquant le principe de HomeDoc. "Je me suis dit que ce serait d’autant plus simple [de trouver et louer un logement] avec des médecins [ou futurs-médecins], on créé un réseau et on se fait plus confiance qu’avec un propriétaire d’un autre milieu." C’est sur ce site qu’il a trouvé son prochain logement sur Rouen. "La propriétaire est praticienne hospitalière en génétique", glisse-t-il.

Louer à un interne, c'est faciliter sa formation, diminuer sa charge mentale, favoriser sa mobilité...

Depuis février, le site est en pré-lancement. 35 à 40 personnes ont indiqué être "intéressées" par au moins une annonce, et 76 logements sont présentés sur HomeDoc. Pour les propriétaires, cela permet de faire un geste "socialement utile puisque louer à un interne, c’est faciliter sa formation, diminuer sa charge mentale, favoriser sa mobilité et donc potentiellement proposer une meilleure répartition de l’offre de soin en France". C’est d’ailleurs ce que le Dr Dosseh a vécu. "J’ai eu une bonne expérience à Rouen donc j’y suis resté, reconnaît le cardiologue. C’est important de donner aux internes cette facilité de mobilité pour que même dans les villes sous-dotées comme Dieppe ou Elbeuf, ils puissent envisager de rester parce qu’ils ont un logement sur place."

Les propriétaires peuvent aussi réduire la vacance locative. "Nos stages sont synchronisés de manière nationale, donc un interne qui quitte un logement le 30 avril, c’est un interne qui peut y rentrer ou qui en a besoin le 2 mai", ajoute-t-il. Et si l’interne souhaite partir pour effectuer un stage ailleurs, "soit il passe par HomeDoc pour faire de la sous-location, avec l’accord du propriétaire, soit il libère le logement. Donc les périodes où le propriétaire essaye d’anticiper pour trouver quelqu’un rapidement ne sont plus une préoccupation. Il va forcément trouver quelqu’un."

Le site sera monétisé à partir d’août. Si le dépôt et la consultation d’annonce seront gratuits, la mise en relation entre locataires et propriétaires sera en revanche payante. Pour ces derniers, il faudra débourser "5 ou 7% du premier mois de loyer". Côté locataires, il faudra compter "24% ou 36% du premier mois de loyer en fonction de la mise en relation avec un propriétaire interne [pour favoriser l’entraide entres internes] ou non-interne". Une bonne affaire, assure le Dr Desseh : "C’est une réduction de près de 70 à 80% des frais par rapport à une agence immobilière qui prend en moyenne un mois de loyer."

 

*Toutes les villes ne proposent pas de logement à l’internat, c’est le cas de Paris.
**Le bail de mobilité ne peut durer qu’entre un et dix mois et ne peut être renouvelé.

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