"Clone anglais" du Sars-CoV-2 : le Conseil scientifique livre son analyse

30/12/2020 Par Aveline Marques
International

Dans une "note d'alerte" transmise au Gouvernement le 22 décembre, les experts du Conseil scientifique dressent l'état des connaissances sur le "clone VIU-UK" qui s'est diffusé au Royaume-Uni depuis son apparition, mi-septembre. Face à cette variante plus transmissible mais dont la pathogénicité serait identique et le risque de réinfection nul, le Conseil exhorte à la prudence. Le "clone anglais" du Sars-CoV-2 a été détecté pour la première fois mi-septembre outre-Manche et s'est depuis diffusé essentiellement dans l'est et le sud-est de l'Angleterre, ainsi qu'à Londres, jusqu'à représenter plus de 60% des cas diagnostiqués dans ces régions le 18 décembre. "L’analyse des données de surveillance suggère que ce clone se retrouverait davantage chez les enfants durant cette période de confinement où les écoles étaient restées ouvertes, mais ce résultat doit encore être validé", relève le Conseil scientifique dans la note d'alerte transmise le 22 décembre aux autorités, mais rendue publique mardi 29. "Les données actuelles fournies par les autorités britanniques rapportent une augmentation du risque de transmission (R0 augmenté de +0.4 en comparaison des autres virus), avec une augmentation modérée de la « charge virale » estimée à partir des valeurs de RT-PCR (augmentation de 0.66 log soit 2 Ct en moins), mais aucune différence n’est notée à ce jour en termes de pathogénicité (manifestations cliniques, durée de la maladie) ou d’échappement à la réponse immunitaire des personnes déjà infectées au cours de deux premières vagues", résument les experts. Pour le Centre européen de prévention et de contrôles des maladies (ECDC) toutefois, cette plus grande contagiosité aura un impact estimé "plus élevé sur le nombre des hospitalisations et le nombre des morts".

Des virus portant les mêmes 24 changements nucléotidiques, dont la majorité sont localisés sur la protéine Spike (S), ont été identifiés au Danemark, en Belgique, en Islande, en Italie, aux Pays-Bas, en Allemagne, aux Etats-Unis, au Chili ou encore en Australie. "Des virus très similaires ont aussi été détectés en Afrique du Sud de manière significative, sans qu’un lien épidémiologique ait été identifié entre les cas britanniques et ceux d’Afrique du Sud. Il est probable que ces deux « occurrences » soient indépendantes, mais associées à des mécanismes similaires liés à une infection chronique chez un patient immunodéprimé", analyse le Conseil scientifique qui note que, sur la base de la surveillance et des séquences disponibles, ce clone "parait peu présent en France mais il sera très probablement retrouvé dans les jours qui viennent". "Une surveillance active s’impose", alertent les experts, compte-tenu notamment de "l’apparition d’une substitution N501Y [qui] pourrait augmenter...

les capacités d’attachement au récepteur ACE2, participant de fait à une augmentation du risque de transmission". "La même substitution N501Y et les délétions 69-70 et 141-145 peuvent être associées à une perte de certains sites de neutralisation (fixation d’anticorps neutralisants). Ce possible échappement immunitaire pourrait théoriquement conduire à un risque de réinfection, ainsi qu’a une perte d’efficacité de la protection immunitaire associée aux vaccins actuels", relève la note. Mais pour le Conseil scientifique, "cette hypothèse n’est actuellement pas confortée par les données de surveillance (taux de réinfection identique dans les zones de circulation du clone VUI-UK et dans les zones où il ne circule pas)". Par ailleurs, "les premières données montrent que des sérums issus de patients ayant fait un Covid avec une autre souche peuvent neutraliser le clone anglais in vitro". "On attend les résultats d’expériences du même type réalisées avec des anticorps neutralisants provenant de sujets ayant reçu un vaccin. De façon théorique, les épitopes vaccinaux sont situés dans des zones différentes des zones de mutations délétions de la protéine S observées chez le clone."

"Les techniques de RT-PCR permettent le diagnostic" de ce clone, "mais sans l’identifier", souligne par ailleurs le Conseil. "La délétion 69-70 entraine une négativation de la détection du gène S de certains tests diagnostiques, tandis que la détection des autres gènes du virus inclus dans les mêmes tests moléculaires n’est pas affectée (« signal de risque »). Cette propriété pourrait être utilisée pour la surveillance, notamment en France qui ne dispose pas du même niveau de séquençage de virus comparé au Royaume Uni." Des procédures de détection rapide par RT-PCR sont en cours de développement outre-manche. "En France, il convient de noter que le CNR des virus respiratoires avait identifié un kit commercial (Thermo Fisher) qui permet déjà de surveiller une éventuelle introduction du clone VUI-UK. Les plateformes MGI des sites d’Amiens, Clermont-Ferrand, Lille, Lyon, Paris-Broussais, Poitiers, Rennes et Tours l’utilisent en routine et représentent environ 30% des tests RTPCR réalisés en France." Quant aux tests antigéniques, la "plupart" détectent la protéine de nucléocapside du virus SARS-CoV-2. "Ils n’ont donc a priori pas de raison d’être affectés par les mutations de la protéine Spike."  

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A tout problème complexe, il y a une solution simple .... et fausse. Il faut cesser de voir la médecine libérale comme une rustin... Lire plus

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