Sanctions confirmées contre les deux pédopsychiatres qui avaient voulu "protéger des enfants en danger"

30/01/2023 Par Louise Claereboudt
Faits divers / Justice
Les Dres Izard et Fericelli étaient convoquées devant la chambre nationale de l'Ordre des médecins le 24 novembre dernier, dans le cadre de signalements de suspicions de maltraitance et de violences sur mineurs. Leurs sanctions ont été confirmées.  
 

"Monsieur François Braun vous trouvez cela normal ?", interroge la Dre François Fericelli, amère. La chambre nationale de l'Ordre des médecins – devant laquelle elle était convoquée le 24 novembre dernier – a confirmé l'avertissement prononcé par la chambre régionale d'Auvergne Rhône Alpes en première instance dans le cadre d’un signalement d’une "fratrie en danger". Le motif ? "Immixtion dans les affaires de famille", rapporte la pédopsychiatre sur ses réseaux sociaux. 

Son avertissement concernait l’aîné de cette fratrie, en situation de handicap. Le père, décrit comme "violent", a fait une tentative de suicide à l’arme blanche devant ses trois enfants, dont l’aîné, "au moment de la séparation avec la mère". Ce dernier a ensuite perdu l’autorité parentale, mais porte néanmoins plainte contre la pédopsychiatre à la suite de son signalement de maltraitance. Depuis, l’homme a été condamné pour violences conjugales et l’un des enfants de la fratrie, qui n’était pas le patient de la Dre Fericelli, s’est suicidé. 

De son côté, la Dre Eugénie Izard, également convoquée le 24 novembre dans le cadre d’un signalement de suspicions de maltraitance sur une fillette de 8 ans, a de nouveau été condamnée à 3 mois d'interdiction d’exercer, dont 1 avec sursis, cette fois au motif d'"immixtion dans les affaires de famille". La pédopsychiatre de Toulouse avait été condamnée une première fois, en décembre 2020, à la même sanction mais au motif de "violation du secret médical", cette dernière ayant averti le juge des enfants. 

Une sanction disciplinaire qui avait été annulée par le Conseil d’Etat le 30 mai 2022. La plus haute juridiction administrative jugeait en effet que "la seule circonstance que ce signalement ait été adressé au juge des enfants (...) ne saurait, à elle seule, alors que le juge des enfants était déjà saisi de la situation de cet enfant, caractériser un manquement" au code de la santé publique. Pour l’Ordre, la praticienne avait contrevenu "à ses obligations déontologiques". 

Le Conseil d’Etat avait toutefois renvoyé l’affaire à la chambre disciplinaire nationale de l'Ordre, qui, comme le craignait la Dre Izard, vient donc de la condamner à une nouvelle interdiction d’exercer – qui prendra effet le 1er avril 2023. Sur ses réseaux, la praticienne toulousaine a d'ores et déjà annoncé qu'elle ferait appel de cette nouvelle décision.

Les deux pédopsychiatres ont fondé un collectif "médecins Stop Violences", dont l’objectif premier est de faire changer la loi – jugée floue – afin de protéger les praticiens qui signalent des maltraitances. S’ils ont une obligation de protection, les médecins n’ont pas d’obligation de signalement. Une pétition a d’ailleurs été lancé par le collectif, qui revendique une soixantaine de membres, réunissant plus de 3 300 signatures. 

Selon la Haute Autorité de santé (HAS), moins de 5% des signalements pour maltraitance sur mineurs proviennent en effet du corps médical. On estime à 160 000 le nombre d’enfants victimes de viols et d’agressions sexuelles chaque année. 

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A tout problème complexe, il y a une solution simple .... et fausse. Il faut cesser de voir la médecine libérale comme une rustin... Lire plus

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