Soumission chimique

Soumission chimique : un rapport recommande de lever le secret médical

Dans un rapport remis au Gouvernement lundi 12 mai, la députée Sandrine Josso et la sénatrice Véronique Guillotin formule 50 recommandations pour mieux prévenir la soumission chimique, mieux accompagner les victimes et combattre l'impunité des agresseurs. 

13/05/2025 Par Aveline Marques
Violences sexistes et sexuelles
Soumission chimique

Le procès de Mazan, devenu le symbole de la soumission chimique autour des viols subis par Gisèle Pélicot, sédatée par son mari, "a créé un électrochoc", souligne la députée de la Loire-Atlantique, Sandrine Josso (Modem). "La société toute entière nous regarde : on ne peut plus fermer les yeux ni se boucher les oreilles, on ne peut plus se permettre d'avoir une politique low-cost par rapport aux victimes", insiste-t-elle auprès de l'AFP. 

La soumission chimique n'est pas un phénomène nouveau : la première description clinique date de 1982. Mais "ces situations sont en augmentation constante du fait de la multiplicité des drogues, de leur facilité d’approvisionnement à domicile à partir de sites en ligne, du déploiement des plateformes d’échanges entre agresseurs sur le 'dark web' et du sentiment d’impunité", alerte le rapport remis lundi 12 mai par Sandrine Josso et la sénatrice de Meurthe-et-Moselle, Véronique Guillotin (Parti radical), au ministre chargé de la Santé, Yannick Neuder, et à la ministre déléguée à l'Egalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé.

Si en 2022, 1 229 soumissions et vulnérabilités chimiques vraisemblables ont été analysées par le Centre de référence des Agressions facilitées par les substances (CRAFS), "ces chiffres représentent une estimation infinitésimale des situations", pointent dans ce rapport Sandrine Josso, elle-même victime d'une soumission chimique en novembre 2023, et Véronique Guillotin. Initialement missionnées sur le sujet par l'ancien Premier ministre Gabriel Attal, les deux parlementaires formulent 50 recommandations afin d'améliorer la formation, la prévention, la prise en charge de la soumission chimique ainsi que la recherche sur le sujet. Quinze recommandations sont à mettre en œuvre "en priorité", dès 2026.

La mission préconise ainsi "une levée du secret médical dans les cas de soumission chimique, si la victime ne souhaite pas déposer plainte". Lorsque le médecin "estime en conscience que la victime n'est pas en mesure de se protéger en raison de l’altération temporaire de son discernement ou du contrôle de ses actes par un tiers", après avoir recherché sans succès l'accord de la victime, il doit pouvoir adresser un signalement au procureur de la République sans risquer de poursuites disciplinaires.

 

Former les médecins

Les parlementaires souhaitent également améliorer la formation des médecins et professionnels de santé, avec une première sensibilisation à la soumission chimique dès la deuxième année d'études, dans le cadre du service sanitaire. Les étudiants en sixième année de médecine devraient, par ailleurs, bénéficier d'"une formation dédiée à l’usage détourné de psychotropes, en pharmacologie", estiment ces élues. Relevant que, d'après une récente enquête du Cnom, seules 28% des médecins déclarent savoir quelles sont les aides disponibles pour les victimes de violences sexuelles, le rapport mise aussi sur la formation continue.

"Étant moi-même médecin, je me suis particulièrement interrogée sur les 10 années d’errance médicale [de Gisèle Pélicot] et me suis demandée si la possibilité que son mari la drogue me serait venue à l’esprit, relève Véronique Guillotin. Nous devons mettre l’accent sur la sensibilisation et la formation de tous pour que cette errance ne puisse plus jamais advenir."

La mission préconise, par ailleurs, l’élaboration d’un référentiel par la Haute Autorité de santé sur le dépistage, l’orientation et l’accompagnement des personnes victimes de soumission ou de vulnérabilité chimique. "Celui-ci intègrera notamment une fiche réflexe et une identification des différents lieux où réaliser des prélèvements biologiques dans les heures qui suivent au regard du maillage territorial", précise-t-elle. 

 

Attention aux kits de détection

La mission encourage la généralisation de l’expérimentation sur le remboursement des prélèvements biologiques sans dépôt de plainte dans le cadre du PLFSS 2026, au 1er janvier 2026, alertant en parallèle sur "les dangers que représentent des outils de détection de substances chimiques, autonomes et en vente libre". "Compte tenu de la multiplicité des substances utilisées, de l’apparition constante de nouvelles drogues de synthèse et du faible dosage administré, les experts en toxicologie et criminalistique ont alerté la mission sur l’impossibilité pour des dispositifs appelés 'kits de détection" et actuellement vendus sous forme de languettes, de pailles (etc.) d’identifier une ou plusieurs substances particulières dans un verre", développent les élues.

"Aucun dispositif autonome ne permet en effet de détecter une substance nuisible dans un cadre de soumission chimique, insistent-elles. Inutiles et dangereux, ces outils ne peuvent donc qu’induire de 'faux positifs' et surtout de 'faux négatifs' qui rassurent à tort la victime. Ayant pour objectif une éventuelle judiciarisation, la recherche de substances nocives doit impérativement et uniquement être réalisée par des laboratoires de toxicologie spécialisés, équipés d’outils technologiques appropriés afin de garantir des résultats fiables et des éléments de preuve incontestables aux victimes." 

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