
Le nombre de dermatologues est "critique sur tout le territoire" : la spécialité s'oppose à l'installation régulée
Alors que les débats autour de la proposition de loi Garot doivent reprendre le 6 mai à l'Assemblée nationale, l'ensemble de la communauté dermatologique affiche son opposition à la régulation de l'installation. La démographie de la spécialité est en effet déjà "critique", "même dans des régions peuplées", avance-t-elle, tout en listant des "alternatives".

La régulation de l'installation "porte directement atteinte à la profession médicale, en ignorant la réalité de la pénurie de médecins", réprouve "l'ensemble de la communauté dermatologique" dans un communiqué de presse diffusé ce jeudi 17 avril. Votée le 2 avril dernier par les députés, la mesure a provoqué la révolte de la profession tout entière, qui a annoncé une grève des gardes et du service d'accès aux soins (SAS). Plusieurs syndicats et associations de médecins ont, en outre, appelé leurs confrères à fermer leur cabinet à compter du 28 avril, date à laquelle la mobilisation doit officiellement démarrer. Le lendemain, à l'appel des étudiants en médecine et jeunes médecins, la profession foulera les boulevards de la capitale dans l'espoir d'obtenir un sursaut parlementaire.
Dans leur communiqué, les Futurs dermato-vénérologues de France (FDVF), la Société française de dermatologie et de pathologie sexuellement transmissible (SFD), le Collège des enseignants en dermatologie de France (CEDEF), le Syndicat national des dermatologues et vénérologues (SNDV) ainsi que la Fédération française de formation continue et d'évaluation en dermatologie et vénéréologie affichent leur soutien à cette mobilisation. Concrètement, la régulation telle que défendue par le groupe transpartisan mené par Guillaume Garot instaure un mécanisme d'autorisation des installations par l'ARS. Dans les zones considérées comme sous-dotées, cette autorisation serait accordée "de droit" ; lorsque l’offre de soins est "au moins suffisante", elle serait conditionnée au départ d'un confrère du territoire exerçant la même spécialité.
Pour les dermatologues, dont la démographie est jugée "critique sur tout le territoire avec seulement 3,5 dermatologues/100 000 habitants", cette mesure n'a pas de sens. D'autant que celle-ci risque de s'aggraver dans les années à venir du fait de l'âge avancé des professionnels actuellement en exercice ("25% des dermatologues ont plus de 60 ans")."En ce sens, la notion de 'zone sous-dotée' ne peut s’appliquer à la dermatologie : c’est l'ensemble de notre profession qui exerce sous tension", tiennent-ils à souligner, ajoutant que "même dans des régions peuplées, le nombre de dermatologues est insuffisant". Vouloir instaurer une telle mesure démontre une "méconnaissance totale de nos préoccupations quotidiennes, dans la continuité d'un mépris de nos alertes répétées concernant cette carence", fustigent les dermatologues.
"Un adressage plus pertinent permettrait une meilleure utilisation des ressources" dermatologiques
La mesure serait, en outre, "contre-productive", ajoutent-ils. Alors que "79% des internes en dermatologie projetaient jusqu'alors de s'installer au moins pour partie en libéral", une telle régulation pourrait les "détourner" de ce projet, "au profit d'autres modes d’exercice (autres secteurs, salariat…), voire les faire fuir vers l’étranger". En outre, limiter le libre choix et les projets de vie des jeunes praticiens risquerait de détériorer in fine la qualité des soins prodigués aux patients. Pour la communauté dermatologique, l'urgence est de former plus de dermatologues pour répondre aux besoins croissants des patients. Car elle n'"ignore pas les difficultés" que rencontrent les Français qui veulent chaque jour prendre rendez-vous chez un dermatologue. Mais "nous pensons que d'autres voies sont possibles" pour améliorer l'accès aux soins, défendent les dermatologues.
Parmi les "alternatives" à la coercition proposées : augmenter le nombre d'étudiants en dermatologie – "avec seulement une centaine de nouveaux internes acceptés dans notre spécialité chaque année, nous ne pouvons compenser la perte d’effectif de dermatologues actifs, estimée à 20% sur les 10 dernières années", regrettent leurs représentants ; mettre en place et développer les postes d'assistants territoriaux tels que défendus notamment par les doyens ; revaloriser les "territoires oubliés" avec des mesures incitatives pour les médecins, mais pas seulement ; développer la télé-expertise ; soutenir la création d'équipes de soins spécialisés (ESS) ; et enfin, renforcer la formation des médecins généralistes.
Les généralistes doivent pouvoir "mieux identifier les situations justifiant une orientation vers un dermatologue de celles qu’ils peuvent prendre en charge", soutiennent les représentants des dermatologues. "Notre expérience quotidienne, tant en milieu hospitalier qu'en exercice libéral, montre qu'un adressage plus pertinent permettrait une meilleure utilisation des ressources et un accès optimisé et accéléré aux soins dermatologiques lorsque la situation médicale du patient le nécessite." Ces organisations appellent ainsi à "discuter collectivement" des solutions "constructives", "dont certaines pouvant être mises en place immédiatement".
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