La diminution du nombre de médecins scolaires met en péril la prévention à l’école

03/11/2017 Par Dr Philippe Massol
Santé publique

La carence en médecins de l’éducation nationale menace la qualité et l’égalité du dépistage précoce et de la prévention, en particulier pour les problèmes de l’adolescence : échec scolaire, addictions, obésité, troubles neuro-psychiques. Dans un rapport, l’Académie de médecine recommande de remédier d’urgence à la pénurie de médecins scolaires, de recadrer leur activité dans un statut de médecins de la prévention, d’assurer l’examen de santé pour tous les enfants de 6 ans, et d’instaurer un enseignement universitaire de la médecine scolaire sous la forme d’une formation spécialisée transversale.

Le nombre de médecins scolaires est en diminution constante passant de 1400 médecins de l’éducation nationale (MEN) en 2006 à 1000 en 2016, pour 12 millions d’élèves. L’attractivité pour la médecine scolaire est médiocre en raison de sa faible reconnaissance professionnelle et des mauvaises conditions matérielles. La répartition des MEN en France est hétérogène. Chaque médecin a un nombre d’élèves à suivre qui varie de 2000 à 46 000 ! Et le taux des visites pour les élèves de 6 ans varie selon les régions de 0 à 90% : en moyenne c’est 57% des enfants qui ont eu un examen de santé pratiqué par un médecin ou par une infirmière en 2015. Dans un rapport, l’Académie de médecine pointe les dysfonctionnements responsables selon elles des difficultés actuelles : "une gouvernance imprécise avec l’absence d’évaluation et de priorités d’action, les visites médicales obligatoires en péril, le nombre de médecins scolaires en diminution inquiétante, l’absence d’équipe de santé scolaire et un manque de reconnaissance de la médecine scolaire moderne". L’attractivité pour la profession de médecin scolaire s’est fortement dégradée, souligne les académiciens.  En premier lieu, les MEN sont les moins bien rémunérés des médecins de la fonction publique. Selon le rapport, "une revalorisation justifierait un mode de budgétisation particulier, éventuellement réparti entre les ministères de la solidarité et de la santé et le ministère de l’EN, au besoin dans le cadre plus large de médecins de prévention".  En second lieu l’expertise des MEN est peu valorisée : ils sont considérés par l’administration comme "sans spécialité". "Or, la spécificité de leur profession justifie la reconnaissance d’une formation universitaire de santé scolaire, telle qu’une FST (formation spécialisée transversale). Elle donnerait une meilleure visibilité à la médecine scolaire et, de ce fait, clarifierait le statut des MEN" explique le Pr Pierre Bégué, rapporteur de ce travail. A la suite de ce constat, l’Académie de médecine fait plusieurs recommandations. D’abord, la nécessité "d’instaurer une évaluation à l’aide d’indicateurs fiables et représentatifs pour clarifier les priorités et le pilotage de la santé scolaire". Et "remédier d’urgence à la pénurie des médecins de l’éducation nationale de plus en plus préoccupante. Leur statut pourrait s’inscrire dans un cadre de médecins de prévention dans la fonction publique, pour améliorer leur nombre et leurs conditions matérielles, actuellement peu attractives pour les jeunes médecins désireux de suivre la filière de la médecine scolaire". Le rapport souligne l’importance "d’assurer pour les 800 000 enfants de 6 ans un examen de santé, aujourd’hui très insuffisamment réalisé et inégalitaire, en spécifiant, dans un texte précis, le contenu de la mission des médecins et celui des infirmiers (ères)". Les recommandations portent aussi sur l’instauration d’un enseignement universitaire de la médecine scolaire dans toutes les Facultés de médecine "sous la forme d’une formation spécialisée transversale de médecine scolaire" et le développement d’un enseignement spécifique pour les infirmières scolaires, suffisamment long et comportant une formation sociétale et environnementale. L’Académie plaide pour "renforcer la place de la prévention et de la santé au sein des instances de l’Education nationale en déployant et en renforçant la convention-cadre de 2016, organiser un système de santé scolaire, de la maternelle au lycée, rattaché au Ministère de la santé qui assure, d’une part, la création d’une véritable équipe de santé entre les médecins, les infirmiers(ères),les assistantes sociales et les enseignants ayant reçu une formation spécifique, et, d’autre part, un maillage extra-scolaire robuste entre les professionnels de santé concernés par l’enfant (PMI, généralistes, pédiatres, pédopsychiatres, psychologues, orthophonistes, services sociaux…)".  

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