Un pédiatre suspendu trois ans pour des touchers vaginaux sur plusieurs mères d'enfants

19/03/2024 Par Sandy Bonin
Déontologie
Venue voir son pédiatre pour une consultation post-Covid sur sa fille de 11 mois, la mère de l'enfant a subi un toucher vaginal afin de vérifier la présence d'une prétendue mycose. La patiente a porté plaine. Le pédiatre a été condamné à trois ans de suspension d'exercice par la chambre disciplinaire du Conseil régional de l'Ordre des médecins des Hauts-de-France.   

 

Trois ans de suspension d'exercice. C'est la peine dont a écopé le Dr C., pédiatre, pour avoir pratiqué des touchers vaginaux en dehors de son cadre d'exercice.  

Les faits datent du 25 avril 2022. Mme D. consulte ce pédiatre pour sa fille de 11 mois qui se remet d'un Covid. Le pédiatre interroge alors la mère sur la présence d'un érythème fessier sur l'enfant. "Lors de cet interrogatoire, le praticien lui a posé des questions sur l’éventualité d’une mycose chez elle-même, son mari et le grand-frère de sa fille. Malgré la réponse négative de Mme D., le Dr C. se montrant insistant a souhaité cependant l’ausculter afin de vérifier qu’elle n’avait pas eu de mycose vaginale", relate la décision de la chambre disciplinaire dont Egora a obtenu copie. 

Le pédiatre vaccine alors l'enfant puis demande à la mère de s'installer sur la table d'examen "non sans lui avoir dit qu’une mycose chez elle pouvait avoir des conséquences pour sa fille". La patiente indique que le praticien a "regardé puis touché l’intérieur pendant deux ou trois minutes, puis lui a dit qu’il fallait qu’il vérifie en effectuant un toucher vaginal". Il lui a également "demandé de 'lever son tee-shirt' afin de regarder sa poitrine, lui a demandé de dégrafer son soutien-gorge, et lui a touché la poitrine afin de vérifier qu’elle n’avait pas de mycose sous les seins".  

La patiente précise par ailleurs qu'elle est suivie régulièrement par son gynécologue et qu'elle n'allaite plus sa fille depuis plus de huit mois. Elle indique à l'Ordre que l'examen pratiqué par le pédiatre "ne ressemblait pas du tout à celui pratiqué" par son gynécologue.  

Interrogé par l'Ordre, le pédiatre a admis avoir pratiqué des touchers vaginaux de ce type sur d'autres patientes "quatre ou cinq fois dans sa carrière". Deux jeunes femmes ont indiqué avoir vécu la même situation que Mme D. alors qu'elles venaient pour leurs enfants. Une troisième y a échappé car elle était indisposée.  

Pour sa défense, le Dr C. a insisté sur "la nécessité du toucher vaginal". Le médecin se prévaut également d’un diplôme d’université de pathologies infectieuses de la femme et de l’enfant alors qu’il ne l’a pas déclaré à l’Ordre où seul son diplôme de pédiatre obtenu au Maroc a été validé en France.

Le Conseil régional de l'Ordre a relevé que "l’examen pratiqué sur la mère est illégitime en l’absence de table gynécologique, de matériel de prélèvement, que pour un tel examen, il est nécessaire d’utiliser un spéculum, que les mycoses ne sont pas fréquentes, la mère n’était pas sa patiente, qu’il n’y a eu aucune facturation, aucun rapport écrit de l’examen de la mère". La chambre disciplinaire pointe également que le Dr .C, est inscrit auprès du conseil départemental de l'Ordre du Pas-de-Calais comme exerçant la médecine en tant que médecin spécialiste en pédiatrie et qu'il ne peut l'être que pour une seule spécialité.

Une sanction d’interdiction d’exercer la médecine pour une durée de trois ans a été infligée au Dr C. Elle prendra effet le 1er mai 2024. Le médecin devra également verser 2 000 euros à Mme D. 

 
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